A peine que les échos d’une manifestation culturelle s’estompent, les lumières d’une autre rayonnent. C’est ainsi que nous aimons le paysage culturel de la ville de Tunis. Après les festivités de l’été et le festival de la Medina, ce sont les lumières des JCC qui s’éclairent. Notre curiosité nous conduisait à assister à la première projection du nouveau né de Nouri Bouzid : « Making off » ou « Dernier Film ». Nous avons été, agréablement, surpris par une ouvre artistique marquée par l’audace et l’innovation.
Le film relate l’histoire d’un jeune garçon de 25 ans, Chokri renommé Bahta, qui vit la misère, le chaumage et la délinquance juvénile. Il déclare avoir perdu ses repères suite à son échec au bac. Devant l’absence de perspectives, son seul refuge fut la dense (Rap et Hip Hop) dont la pratique apparaît comme un moyen de distraction, d’épanouissement et d’expression. Son rêve se résume à « atterrir » l’Europe à la conquête d’un changement espéré. Bahta, Lotfi Abdelli dans le film, porte un amour fou envers sa mère et s’attache à sa petite amie (rôle interprété par Affef Ben Mahmoud). Ainsi apparaît l’héros brave, courageux, énergique et un potentiel marginalisé et mal canalisé. Le long du film, le profil de Bahta évolue d’un profil de danseur rêvant d’aller à l’Europe vers le profil d’un intégriste islamiste convaincu par l’idée d’El Jihad et puis vers le profil d’un terroriste attaché à l’idée de mourir martyr. Ce changement radical fut le résultat d’un lavage de cerveau exercé par un groupe de terroristes qui ont apprécié sa bravoure et son courage devant les flics. Autres les conditions qu’il vit et l’influence des intégristes, Bahta se présente comme une victime des vendeurs du rêve de l’immigration clandestine : il a été, cruellement, arnaqué et agressé par l’organisateur des traversés des clandestins (l’interprète Sofiène Chaari). Dans le film, Bahta paraît déchiré entre l’amour de la dense, symbole des principes occidentaux, et l’influence des intégristes.
Le statut de la femme dans la société a été invoqué dans « Making off » à travers deux images paradoxales : moderne contre traditionnelle passéiste. Affef Ben Mahmoud symbolise l’image de la femme moderne, active et positive qui tend vers un avenir meilleur qui la réunit à son amant et où elle agit comme parraine à ses côtés. Cette femme fut nommée d’adultère, volage et perfide par son « nouveau ancien bien aimé » à cerveau lavé. Elle fut, également, agressée et harcelée par son cavalier transformé en intégriste et qui déclare vouloir, par ces actes, la « corriger » et la guider vers le chemin de la vérité. Dorra Zarouk, femme du chef des terroristes, matérialise l’image traditionnelle passéiste de la femme dont le seul rôle est de garder les enfants et d’être, passivement et exclusivement, au service de son maître, pardon de son mari. Une image qui fut caricaturée par le port du voile. L’héros ébloui par sa beauté lui déclare, vers la fin du film, être prêt de mourir martyr pour l’amour de ses yeux. Autrement dit, il est prêt à tout faire pour la libérer de l’environnement obscurantiste et rétrograde au sein duquel elle vit.
Le titre « Making off » tire sa légitimité des séquences making off introduites, soigneusement et habilement, par le metteur en scène pour illustrer certaines idées et insister sur d’autres. Le long de ces séquences, nous avons assisté à un discours entre Nouri Bouzid et Lotfi Abdelli : l’acteur refuse de présenter le rôle d’un intégriste islamiste et trouve du mal à critiquer les Soufis alors qu’il est musulman. Il déclare avoir accepté d’interpréter le rôle d’un danseur et pas celui d’un terroriste. Il insiste sur le fait que l’histoire du film ne peut présenter que l’exception en Tunisie (et certainement pas la règle). Et puis, il avertit le metteur en scène d’être en train de créer un monstre à travers son film. Ce monstre risque fort bien de provoquer l’attaque des journalistes, des intégristes, des hommes de la religion et des politiciens. Il avoue ne plus pouvoir dormir ! Nouri Bouzid partage son acteur l’angoisse, mais il se présente plus audacieux, plus responsable et plus rationnel : « Fais moi confiance… C’est moi qui signe… ». Il déclare être musulman et avoir lu le coran en Arabe et en Français. Nourri ajoute qu’il est simplement contre la théocratie et se montre inquiet d’avoir être entrain de créer un monstre qu’il tuerait s’il le faut !
Le mérite de notre grand Nouri est avant tout d’être audacieux et d’avoir prouver qu’en Tunisie d’aujourd’hui aucun sujet n’est tabou ou « casse gueule ». Il a prouvé encore une fois que la liberté d’expression est, désormais, une réalité tangible : En Tunisie, tout discours cohérent, argumenté et justifié qui n’atteint pas à la dignité des gens et à l’image du pays et ses acquis est accepté et applaudi. Secundo, le mérite de Nourri est d’avoir introduit des séquences Making off dans son film (qui est à notre connaissance une première pour le cinéma Tunisien) pour expliquer par un discours direct et simple des idées centrales. Côté technique, Nourri a exposé son talent de super directeur d’acteurs : Nous avons assisté à un Lotfi Abdelli très expressif et extrêmement convaincant et à une Affef Ben Mahmoud sublime par sa spontanéité et ses sentiments. Rappelons nous que ce même Nouri nous faisait redécouvrir Hend Sabri et Ahmed Hafiane dans « Poupés d’Argile » et mettait haut les projecteurs sur un enfant (qui s’est déjà grandit en art) qui s’appelle Oumeyma Ben Hafsia. Affef Ben Mahmoud a déjà déclaré avoir atteint ce niveau de perfection grâce aux directives de son professeur (Nouri Bouzid) et qu’elle a reçu le scénario du film un an avant le tournage : C’est la méthode Nourri !
Tertio, le mérite de Nouri est d’avoir réussi de sortir le cinéma tunisien de ses clichés et de ses images acquis aux années quatre vingt dix : El Medina, le Souk, El Hamem, le Folklore et une nudité plus ou moins justifiée et le plus souvent parachutée.
Saluons l’audace de Nouri Bouzid et encourageons la coopération Sud Sud (« Making off » est le fruit d’une coopération tuniso-marocaine). Avouons que la coopération Nord Sud a poussé certains cinéastes à satisfaire le « spectateur Nord » en premier lieu. De ce fait, la coopération Sud Sud s’avère une alternative intéressante qui octroie plus de liberté aux artistes tunisiens et leur permet de produire un discours universel. Ces propos présentent un appel à enrichir l’expérience Sud Nord (qui a déjà montré ses preuves et reste de valeur) par un amalgame Sud Sud et Sud Sud Nord qui semble fleurissant et prometteur. Pour finir, nous croyons que Nourri Bouzid s’est aligné à la perception de Kant de l’art : « Ce n’est pas la présentation d’une belle chose, mais la belle présentation d’une chose » et c’est grâce à sa persévérance, sa détermination et son interaction avec l’environnement géopolitique mondial qu’il a essayé de donner des explications bien loin des éloges flatteurs et des propos courtois et sans faire recours à la langue de bois et aux alibis mesquins. Tenons bien les propos de Louis Aragon dans « la rose et le réséda » : « Quand les blés sont sous la grêle fou qui fait le délicat».
Le film relate l’histoire d’un jeune garçon de 25 ans, Chokri renommé Bahta, qui vit la misère, le chaumage et la délinquance juvénile. Il déclare avoir perdu ses repères suite à son échec au bac. Devant l’absence de perspectives, son seul refuge fut la dense (Rap et Hip Hop) dont la pratique apparaît comme un moyen de distraction, d’épanouissement et d’expression. Son rêve se résume à « atterrir » l’Europe à la conquête d’un changement espéré. Bahta, Lotfi Abdelli dans le film, porte un amour fou envers sa mère et s’attache à sa petite amie (rôle interprété par Affef Ben Mahmoud). Ainsi apparaît l’héros brave, courageux, énergique et un potentiel marginalisé et mal canalisé. Le long du film, le profil de Bahta évolue d’un profil de danseur rêvant d’aller à l’Europe vers le profil d’un intégriste islamiste convaincu par l’idée d’El Jihad et puis vers le profil d’un terroriste attaché à l’idée de mourir martyr. Ce changement radical fut le résultat d’un lavage de cerveau exercé par un groupe de terroristes qui ont apprécié sa bravoure et son courage devant les flics. Autres les conditions qu’il vit et l’influence des intégristes, Bahta se présente comme une victime des vendeurs du rêve de l’immigration clandestine : il a été, cruellement, arnaqué et agressé par l’organisateur des traversés des clandestins (l’interprète Sofiène Chaari). Dans le film, Bahta paraît déchiré entre l’amour de la dense, symbole des principes occidentaux, et l’influence des intégristes.
Le statut de la femme dans la société a été invoqué dans « Making off » à travers deux images paradoxales : moderne contre traditionnelle passéiste. Affef Ben Mahmoud symbolise l’image de la femme moderne, active et positive qui tend vers un avenir meilleur qui la réunit à son amant et où elle agit comme parraine à ses côtés. Cette femme fut nommée d’adultère, volage et perfide par son « nouveau ancien bien aimé » à cerveau lavé. Elle fut, également, agressée et harcelée par son cavalier transformé en intégriste et qui déclare vouloir, par ces actes, la « corriger » et la guider vers le chemin de la vérité. Dorra Zarouk, femme du chef des terroristes, matérialise l’image traditionnelle passéiste de la femme dont le seul rôle est de garder les enfants et d’être, passivement et exclusivement, au service de son maître, pardon de son mari. Une image qui fut caricaturée par le port du voile. L’héros ébloui par sa beauté lui déclare, vers la fin du film, être prêt de mourir martyr pour l’amour de ses yeux. Autrement dit, il est prêt à tout faire pour la libérer de l’environnement obscurantiste et rétrograde au sein duquel elle vit.
Le titre « Making off » tire sa légitimité des séquences making off introduites, soigneusement et habilement, par le metteur en scène pour illustrer certaines idées et insister sur d’autres. Le long de ces séquences, nous avons assisté à un discours entre Nouri Bouzid et Lotfi Abdelli : l’acteur refuse de présenter le rôle d’un intégriste islamiste et trouve du mal à critiquer les Soufis alors qu’il est musulman. Il déclare avoir accepté d’interpréter le rôle d’un danseur et pas celui d’un terroriste. Il insiste sur le fait que l’histoire du film ne peut présenter que l’exception en Tunisie (et certainement pas la règle). Et puis, il avertit le metteur en scène d’être en train de créer un monstre à travers son film. Ce monstre risque fort bien de provoquer l’attaque des journalistes, des intégristes, des hommes de la religion et des politiciens. Il avoue ne plus pouvoir dormir ! Nouri Bouzid partage son acteur l’angoisse, mais il se présente plus audacieux, plus responsable et plus rationnel : « Fais moi confiance… C’est moi qui signe… ». Il déclare être musulman et avoir lu le coran en Arabe et en Français. Nourri ajoute qu’il est simplement contre la théocratie et se montre inquiet d’avoir être entrain de créer un monstre qu’il tuerait s’il le faut !
Le mérite de notre grand Nouri est avant tout d’être audacieux et d’avoir prouver qu’en Tunisie d’aujourd’hui aucun sujet n’est tabou ou « casse gueule ». Il a prouvé encore une fois que la liberté d’expression est, désormais, une réalité tangible : En Tunisie, tout discours cohérent, argumenté et justifié qui n’atteint pas à la dignité des gens et à l’image du pays et ses acquis est accepté et applaudi. Secundo, le mérite de Nourri est d’avoir introduit des séquences Making off dans son film (qui est à notre connaissance une première pour le cinéma Tunisien) pour expliquer par un discours direct et simple des idées centrales. Côté technique, Nourri a exposé son talent de super directeur d’acteurs : Nous avons assisté à un Lotfi Abdelli très expressif et extrêmement convaincant et à une Affef Ben Mahmoud sublime par sa spontanéité et ses sentiments. Rappelons nous que ce même Nouri nous faisait redécouvrir Hend Sabri et Ahmed Hafiane dans « Poupés d’Argile » et mettait haut les projecteurs sur un enfant (qui s’est déjà grandit en art) qui s’appelle Oumeyma Ben Hafsia. Affef Ben Mahmoud a déjà déclaré avoir atteint ce niveau de perfection grâce aux directives de son professeur (Nouri Bouzid) et qu’elle a reçu le scénario du film un an avant le tournage : C’est la méthode Nourri !
Tertio, le mérite de Nouri est d’avoir réussi de sortir le cinéma tunisien de ses clichés et de ses images acquis aux années quatre vingt dix : El Medina, le Souk, El Hamem, le Folklore et une nudité plus ou moins justifiée et le plus souvent parachutée.
Saluons l’audace de Nouri Bouzid et encourageons la coopération Sud Sud (« Making off » est le fruit d’une coopération tuniso-marocaine). Avouons que la coopération Nord Sud a poussé certains cinéastes à satisfaire le « spectateur Nord » en premier lieu. De ce fait, la coopération Sud Sud s’avère une alternative intéressante qui octroie plus de liberté aux artistes tunisiens et leur permet de produire un discours universel. Ces propos présentent un appel à enrichir l’expérience Sud Nord (qui a déjà montré ses preuves et reste de valeur) par un amalgame Sud Sud et Sud Sud Nord qui semble fleurissant et prometteur. Pour finir, nous croyons que Nourri Bouzid s’est aligné à la perception de Kant de l’art : « Ce n’est pas la présentation d’une belle chose, mais la belle présentation d’une chose » et c’est grâce à sa persévérance, sa détermination et son interaction avec l’environnement géopolitique mondial qu’il a essayé de donner des explications bien loin des éloges flatteurs et des propos courtois et sans faire recours à la langue de bois et aux alibis mesquins. Tenons bien les propos de Louis Aragon dans « la rose et le réséda » : « Quand les blés sont sous la grêle fou qui fait le délicat».
Une tres belle Analyse; châpeau Ashraf! Quant, à la cooperation Sud-Sud, C une tres belle idée; nous les Tunisiens nous avons mare des scènes de nudité parachutées et en quelques sorte imposées... Mais, je suis d'accord avec toi nous devons en
ReplyDeleteaucun cas rompre avec la cooperation Nord-Sud; C hors question!
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